Written by: Elena Brambilla

Follow me:

8. février 2016

TRAVERSÉE DE L’ATLANTIQUE : C’EST FAIT !

Le Maroc a été une expérience extraordinaire, mais après la fabrication de 15 prothèses là-bas, il était temps de repartir et de se préparer à l’un des plus grands défis de tout navigateur : la traversée de l’océan Atlantique.

Nous avons d’abord amené Imagine, notre Lagoon 410, aux Îles Canaries, afin de soigner chaque détail du bateau et de ne pas nous mettre en danger au milieu de l’océan. Tout a été minutieusement contrôlé, du gréement jusqu’au fond de cale. Dès que les conditions météorologiques ont été suffisamment stables pour partir, nous avons acheté les dernières provisions et les avons rangées… Croyez-moi, le ticket de caisse était long comme le bras !

IMG_6217 IMG_6219 IMG_6226 IMG_6216

Après avoir dégusté un dernier steak, le 5 décembre, nous avons quitté la sécurité du port de Las Palmas pour rejoindre les Caraïbes. Un nouveau sentiment, indéfinissable, a envahi nos cœurs, ce mélange de tension, d’adrénaline, de respect et de curiosité qui accompagne les grands événements. Nous nous sommes regardés dans les yeux, avons caressé une dernière fois le bateau et avons mis les voiles : 2 800 miles de bleu infini, de vagues, de soleil et de vent nous attendaient.

IMG_6223

Les sept premiers jours de la traversée ont été calmes : nous avons mis le cap au sud-ouest et hissé le spinnaker, soutenus par un vent modéré. Le soleil brillait et les nuits étaient douces. Navigant à une vitesse moyenne de 6 nœuds, nous pensions arriver à temps pour Noël. Imagine était extraordinaire et fendait les vagues sans problème. Chaque jour, des bancs de dauphins nous rendaient visite et jouaient avec le bateau, peut-être curieux de voir ce beau poisson orange. J’aime croire qu’Imagine aimait aussi jouer avec eux !

IMG_6214 IMG_6222

Presque en face du Cap-Vert, le vent est tombé et nous avons mis en marche les moteurs en attendant qu’il reprenne. Au bout de deux jours, comme nous ne voulions pas consommer trop de carburant, nous avons décidé de couper la propulsion. Ce moment a été incroyablement magique ! Au beau milieu de l’Atlantique, l’eau semblable à un miroir, nous avons joué avec une grosse tortue de mer, pêché des dorades coryphènes et regardé des films le soir, sous la voûte étoilée. Nous avons passé deux jours comme cela et nous n’oublierons jamais l’image du petit Lagoon orange reposant calmement sur l’océan.

IMG_6218 IMG_6220

Au matin du 17 décembre, le vent est revenu frapper à notre porte, mais sans aucune courtoisie : un vent arrière de force 5, 6 et 7, produisant une forte houle dans une mer contraire. Plus aucune chance de hisser notre léger spinnaker. Avançant uniquement avec sa grand-voile réduite, Imagine sautait, courrait, surfait sur les vagues en vrombissant. Il restait stable et droit et tenait bon, malmené, mais intact. Nous n’aurions pas pu trouver de meilleur bateau ! Nous nous sommes vite habitués à la situation et avons poursuivi nos tâches quotidiennes à bord : cuisine, téléchargement des prévisions météo, lecture, contrôle du bateau, en dormant 3 ou 4 heures chacun pendant la nuit. Les premiers grains sont arrivés du jour au lendemain. Nous devions fréquemment prendre la barre et redoubler de vigilance, mais tout s’est bien passé.

IMG_6225

Malheureusement, après quatre jours de vent calme, nous n’étions pas à Sainte-Lucie pour Noël, mais nous avons organisé un réveillon mémorable à bord, avec la plus grosse dorade coryphène de tout le voyage, un dîner succulent, des cadeaux et même un arbre de Noël !

IMG_6215

Aux premières heures du 27 décembre, nous avons vu se profiler Sainte-Lucie : après 2 873 miles et une traversée de l’océan Atlantique, nous touchions au but, Imagine et nous ! Comment nous sentions-nous ? Comme après une traversée de l’océan… Il n’y a pas d’autre mot pour le dire ! Nous avions réussi ! Nous avons commencé par laver Imagine à grande eau, car il était recouvert de sel et méritait tous nos soins. Quelques jours plus tard, nous sommes partis à la recherche des patients soutenus par le ministère de la Santé de Sainte-Lucie, mais nous vous en parlerons bientôt !

IMG_6221

La traversée de l’océan a été l’une des expériences les plus fortes de notre vie ! Nous avons appris, si c’était possible, à nous faire encore plus confiance l’un à l’autre et dans l’ensemble, à Imagine. Nous n’avons pas regretté une seule seconde d’avoir acheté ce Lagoon. Bien au contraire, nous avons grandement apprécié d’avoir un bateau tellement stable et fiable, facile à manœuvrer, agréable à vivre et incroyable à piloter !

Il est déjà temps de reprendre le travail et d’apporter un peu d’espoir ici aussi : le bonheur peut traverser les océans et accoster partout !

IMG_6227

30. octobre 2015

SAILING4HANDICAPS : Top départ !

C’est vrai, nous devons l’avouer, notre projet a commencé depuis quelques mois… Mais notre blog est resté vide. Cela peut sembler étrange, mais même aujourd’hui, au XXIème siècle, trouver une connexion Internet fiable est une entreprise hasardeuse. Ceci est une règle générale qui est encore plus vraie en mer !

Nous voici donc enfin connectés pour vous raconter ce qu’il s’est passé ces derniers mois.

Au début de l’été nous avions quitté la froide Allemagne direction le Sud en laissant derrière nous, mille après mille plusieurs pays européens. Peut-être que vous souhaitez savoir à quoi ressemble la vie à bord d‘un bateau ? La réponse est simple : une multitude d‘émotions vous envahit… Elles se suivent mais ne se ressemblent pas ! La mer et ses habitants sont beaux, à vous couper le souffle. Votre cœur s’emballe puis cesse de battre un instant, juste pour reprendre dès que le vent souffle dans les voiles.

Imaginez, c‘est incroyable : notre petit bébé nous a transportés en toute sécurité jusqu’au Portugal. Parfois de manière gracieuse, à la voile, et de temps en temps avec un air pataud accompagné du bruit de ses moteurs. Quelques fois, heureusement, en sautant et glissant sur les ondes des vents forts. Cette descente du Nord vers le Sud de l’Europe a été aussi pour nous un test important avant de traverser l’Atlantique. Nous savons maintenant que nous sommes une équipe forte et nous ne jetterons pas l’éponge !

Après des mois en Europe, le moment est venu de naviguer vers le Maroc à la rencontre de nos premiers patients qui nous attendent déjà.

Facile à dire, mais pas facile à faire : une dépression localisée sur l’Atlantique Nord a décidé de nous accompagner pendant tout le chemin avec un vent de face constant de plus de 30 nœuds.

Pouvez-vous imaginer “Imagine“ au milieu de l’océan avec le super capitaine Wojtek et sa fidèle super compagne Elena (malheureusement avec un plâtre sur la jambe), tout le monde sautillant sur un pied ! C’est avec cette météo que nous avons été accueillis au Maroc. Notre plan était de débarquer à Safi, mais la dépression nous a forcés à nous diriger vers la baie de Mohammedia où un petit port de plaisance, tout à fait sympathique, nous a offert un abri mérité.

Nous y sommes, au Maroc ! Pas même le temps de s’installer que nous avons commencé à travailler. Il y a trois jours, notre mécanicien orthopédiste Christoph Ganter, un bon ami qui travaille avec Wojtek depuis des années, nous a rejoint.

Christoph a atterri à Marrakech, où un centre orthopédique sera notre QG pour cette étape. Deux heures après son arrivée, notre bavarois était déjà au travail.

Les deux premiers jours ont été utilisés pour découvrir et discuter avec les patients. Il a fallu aussi prendre toutes les mesures avec du plâtre afin d’obtenir une copie négative de leurs moignons. Un travail de longue haleine, si vous considérez que nous avons rencontré 15 personnes avec des problèmes, des âges et des origines complètement différents. Mais ils ont tous une chose en commun : leurs sourires face au trésor qu’ils vont recevoir.

Qu’est-ce que cela signifie de perdre une jambe au Maroc ? L’exclusion de la vie quotidienne, la perte de votre emploi et d’énormes difficultés pour vivre. Prenons le cas de cet enfant qui ne va pas plus à l’école car les autres enfants se moquent de lui, ou celui de ce père qui voudrait se déplacer à nouveau pour jouer avec ses deux petites filles… Vous pouvez comprendre combien ces sourires sont vrais et remplissent nos cœurs !

Troisième journée de travail : les copies négatives des souches doivent être remplies avec du plâtre afin d’obtenir leur positif : nous sommes entièrement recouverts de poudre blanche. Je pense que nous allons devoir demander à notre machine à laver un effort supplémentaire ce soir !

Christophe sculpte les plâtres comme un sculpteur expert. S’il n’avait pas son accent bavarois unique, je serais tenté de l’appeler Michel-Ange !

Ce soir, nous retournons au bateau car demain, nous allons commencer à construire les premières prothèses à bord … nous avons hâte pour elles ! Restez à l’écoute !

Top